Yucatan, jaune tortilla et bleu marine

   

De Mérida j’ai migré vers l’ouest jusqu’à Celestun un village pour y patauger dans le golfe du Mexique et voir des flamands roses. J’ai revu la mer et les flamands sontmoins nombreux que les touristes migrateurs essentiellement nord américain qui hibernent au chaud attendant le dégel canadien, aussi quelques spécimens européens de passage. La côte est bordée de mangrove, un écosystème adapté aux estrans subtropicaux. Estran ? La zone toujours humide laissée par les marées. Des palétuviers agrippés sur leurs racines aériennes enchevêtrées clôturent aussi sûrement que des barbelés l’accès à tous étrangers n’appartenant à cet écosystème. Tout une flore et faune y vivent j’ai surtout constaté que les moustiques sont l’espèce la plus nombreuse. Ils des centaines en escadrilles, cela va gratter la nuit si je ne trouve pas une pharmacie.

      

ALBUM CELESTUN 

 Après deux couchers de soleil banaux et quelques discussions mécaniques avec les moto taxi sur les bricolages de leurs engins j’ai repris un bus Oriente sur Mérida et enchaîné dans un ADO, une grosse compagnie de bus, pour ma prochaine étape sur le chemin de Cancun où m’attend un vol retour vers Mexico.

Cinq heures après mon départ du golfe du Mexique je descends à Izamal la ville jaune que me conseillèrent un couple de lyonnais rencontré lors d’un déjeuner en commun sur une terrasse à Celestun. Une étape sympa. Je n’ai parcouru que seulement 150 km, un tiers du parcours jusqu’à la mer Caraïbe. Je ne suis pas pressé je prévois un stop de trois jours ici. L’invasion touristique du Yucatan n’a pas encore trop fait grimper l’inflation dans ces petites villes encore à l’écart. J’ai une vraie chambre d’hôtel pour le prix d’un lit dans un dortoir.

       

Le bus me laisse derrière le marché face à une architecture qui attire l’œil. D’abord la couleur jaune, pas jaune gilets : jaune tortillas. Mon regard redessine la géométrie symétriques de deux rampes d’accès menant à une série d’arcade, c’est sobre, clair comme un dessin de tintin.

Nous détaillerons ceci plus tard je dois rouler ma valise rouge dans les rues jaunes jusqu’à l’hôtel situé à 1km de marche. Les rues sont numérotées et parralléles entre elles selon la logique pairs perpendiculaires aux impairs. Je descends la 27 où je trouve mon hôtel entre la 22 et 24. Jaune sous un ciel bleu devant un fond vert végétale, ces trois couleurs attendent un peintre impressionniste avec ses pinceaux, sa palette et sa toile blanche tendue sur le chevaleret qui partagerait sa vision sur le mur d’un musée.

      

Pourquoi ce jaune ?

Plusieurs explications.

La plus ancienne remonte aux mayas, car nous sommes dans une ancienne cité maya qui fût importante. Il reste une grosse pyramides en plein milieu et beaucoup de maisons coloniales se sont bâtis sur des anciennes fondations. Le jaune serait en lien avec la couleur du maïs leur plante sacrée. Le premier homme maya a été créé par le dieu Itzama avec de la farine de cette céréale. Vous avez remarqué la similitude des mots. Izamat et Itzama, pas un hasard cela signifie « rosée du matin » qui donna la vie à leur Adam et Eve.

L’hypothèse maya me paraît un peu trop vendeuse.

Une autre version plus proche de nous serait une affaire fiscale au moment du déclin économique de la production de henequen utilisé dans la fabrication de corde. Ce fût jadis le PIB du Yucatan. Vers 1850 la municipalité a décidé de taxer les publicités sur les murs pour compenser les déficits. Les gens refusèrent d’y participer et peignirent leurs murs en jaune, peut-être pour effacer leurs enseignes. Je veux bien faire semblant d’y croire.

Et la dernière encore plus proche de nous, en 1993 avec la visite du pape Jean-Paul II. Par vénération les fidèles ont repeint leurs maisons aux couleurs du Vatican, or et blanc. De nombreuses façades exhibent des motifs catholiques blancs.

Bon, chacun choisira la version qui lui plaît. Je prends la maya pour la partie religieuse et la visite du pape pour les maisons des paroissiens.

  

L’immense forteresse qui fait le centre ville est en réalité un couvent, sa situation en hauteur et son profil peuvent effectivement faire penser à un bastion. Le couvent Saint Antoine de Padoue fût terminé vers 1561. Son atrium ceinturé de 75 arches est le deuxième au monde derrière le Vatican, l’église aime que l’on respecte la hiérarchie. S’il est surélevé c’est qu’il était trop dur de raser entièrement la structure maya en dessous alors autant en profiter et un édifice religieux au-dessus du commun des mortels c’est plus classe.

Avant de quitter la ville jaune je voulais vérifier un truc : le cimetières aussi ?

Seul quelques tombes contrarient la couleur tortilla dominante. 

     

ALBUM IZAMAL

Un bus toutes les deux heures sort vers Cancun, j’ai le choix de l’heure. Le paysage est monotone, une végétation touffue et basse borde la route enfermant la vue dans un tunnel vert. Les traversées et arrêts dans les villages animent un peu le trajet. 5 heures plus tard l’estomac un peu secoué par la conduite sportive je descends du bus et monte dans un taxi vers mon logement airbnb au village de Puerto Morelos au sud de Cancun le pèlerinage des touristes du monde entier que je voulais éviter. Le logement est éloigné de la plage, cet inconvénient se transformera en avantage une fois le parcoure optimisé. Au coin de la rue les combi descendent à la plage en 10 minutes pour une pièce de 10 pesos, 0,5 €. Sur tout ce littoral des caraïbes un banc de retraités nord américain s’étend le long de la barrière de corail. Je suis mieux dans ma «colonia» mexicaine avec les gosses de la rue qui tapent le ballon tous les soirs. Une Colonia est un quartier. Le mot barrio penche plus vers le populaire.

   

ALBUM PUERTO MORELOS