Congé j'aime, sénior j'aime pas

Depuis novembre dernier je ne travaille plus, cela s’appelle « congé sénior », congé j’aime, sénior je n’aime pas. Un plan social proposé par mon employeur qui doit reconquérir rapidement quelques points de compétitivité sur un marché très concurrentiel, l’automobile. Depuis des années je n’étais préparé, j’ai imaginé des projets tous azimuts. Patatrac, le temps qui passe c’est  vieillir. Et à moins d’avoir de la chance ou une hygiène de vie parfaite, c’est d’un déclin plus ou moins rapide qu’il s’agit. Voilà ce que signifie sénior. La mécanique est usée, je dois aller plus souvent au contrôle technique, excusez moi bilan médical. On ne se débarrasse pas de son vocabulaire pro du jour au lendemain, j’ai passé ma vie dans la bagnole. Moi, c’est la pompe et sa tuyauterie qui s’est endommagée trop tôt. Il a fallu m’ouvrir la poitrine pour réparer. Là j’ai eu besoin d’un mois de séance de rééducation cardiaque, une remise en état. Maintenant que le cœur pompe correctement il serait bon que je subisse une décontamination. Je suis pollué de 40 ans de boulot, métro, dodo. La formule est usée certes, elle m’a usinée. Je m’en m’étais pas rendu compte mais 40 ans dans l’industrie automobile cela en fait du cambouis à laver. Je ne joue pas les vétérans des trente glorieuses, je pense même avoir été plutôt peinard comparé à la génération précédente. Je ne pas suis sorti diplômé d’une grande école à fabriquer des élites cravatées, donc j’ai  serré des boulons tout ce temps. Parfois je l’ai pris comme une condamnation, j’ai survécu mais vécu de bons moments aussi, j’aime les autos. Toutefois il y a autre chose que les bagnoles qui carburent dans ma tête. Depuis des années un drôle de cliquetis me tracasse : l’existentialisme. Faut-il toujours suivre la même route ou mettre le clignotant et s’aventurer sur d’autres chemins sans suivre les signalisations mises en place par le système, big brother ou big data. Je ne vais pas trouver la réponse c’est certain. De grands esprits s’y sont penchés et il semblerait qu’il n’existe pas une réponse unique. Tant mieux, chacun a une chance de trouver sa voie. Mais avant de tenter la philo je dois décontaminer mon l’esprit ; « Changer de calculateur ».  On ne le voit pas tout de suite que nous sommes recouverts d’une épaisse couche de préjugés lorsque l’on ne côtoie que des semblables. Face à d’autres profils cela devient évident. Avez-vous discuté avec un laveur de carreaux aux feux rouges de Sao Paulo ? Un militant convaincu qui continue à défendre une cause perdue à vos yeux ? Un artiste qui veut immortaliser la lumière sur une toile ? Un éleveur bio de nos campagnes ou un amish de Pennsylvanie ? La différence se voit comme un nez au milieu de la figure.  C’est à cause de la croute qui s’est déposée  depuis des années dans notre façon d’aborder la vie. Donc pour ralentir l’évolution de cette contamination, Je dois m’isoler de mon quotidien je vais changer d’atmosphère, aller voir ailleurs que mon petit « chez soi  et quitter mon arrondissement Parisien. Drôle de coïncidence j’habite à quelques mètres  de la célèbre réplique « Atmosphère, atmosphère » que s’échange Arletty et Monsieur Jouvet au bord du canal St Martin. Pendant mes quatre dernières années au boulot, la fenêtre donnait sur le cimetière de Courbevoie ou repose La grande Arletty.  

Hôtel Du Nord (1938) - "Atmosphère" scene with Arletty

Comments

[thierry]

Pour l'instant j'ai de la chance car mon boulot m'envoie aux quatre coins du monde et ca me nettoie la couche de crasse des petites habitudes.

Bonne idée ce blog, alimente nous de tes derniéres escapades toujours enrichies de belles photos

[Annick Loy]

Une bonne idée ce blog, je viendrai souvent y faire un tour ! Pour moi cela va faire 15 ans bientôt que je suis en congé permament et je ne me sens pas senior du tout !!!

[pat]

le début d'une nouvelle vie avec encore plus de rencontres et de découvertes, profites en bien géraldo et au plaisir de te revoir