Gand n'est pas dans de sales draps.

Gand : Belgique, chef lieu de la Flandre orientale. En créant des régions orientale et occidentale un pays paraît plus grand. Pareil qu’à Bruges, des canaux quadrille la ville, avec en plus un vrai accès à la mer. Des bateaux de 80 000 tonnes transportent leurs cargaison sur le canal de Terneuzen, le port sur l’estuaire de l’Escault situé à 32 km en Flandre zélandaise. Gand ne se compare pas à Venise comme sa sœur Bruges, elle vise plus haut. Les guides touristiques toujours généreux dans les superlatifs la surnomme «La Manhattan du moyen age» en rapport à sa silhouette skyline dessinée par les clochers des églises, du beffroi et la cathédrale qui s’entassent autour du pont St Michel.

   

Au moyen age une cathédrale c’était s’élever et se rapprocher du ciel, voir le paradis. Depuis nous sommes allés bien haut et toujours pas de paradis. Avec ses 95 mètres le beffroi n’inquiète pas le ciel si bas de Jacques Brel. En effet les silhouettes enchevêtrées dans un ciel si gris offrent un relief particulier à Gand.J’ai personnellement un penchant pour l’église St Nicolas avec sa grosse tour carré soutenue par des rondes qui renforcent l’édifice. C’est l’une des premières financée par les marchands en l’honneur de leur saint protecteur Nicolas. Saint Michel est mon point repère visuel avec son clocher trapue comme un donjon. On le sent protégé Saint Michel.

  

Et enfin la cathédrale saint Bavon, je n’ai pas honte d’avouer que j’ignorais l’existence de ce saint. Faut dire qu’il faut remonter à loin, il vécut à Gand de 589 à 659. Les flamands l’honore le 1^er octobre, au moins je l’aurais appris. Saint Bavon abrite une peintures très intrigante : l’adoration de l’agneau mystique peint par les frères Ecyck, Hubert l’aurait commencé et Jan la termina en 1432. Là on entre dans le catéchisme et tout le tintouin. Les vrais croyants et les amateurs de peinture peuvent s’extasier pendant de longues minutes. C’est l’une de ses œuvres où experts et mystiques «matin des magiciens» y cherchent des messages subliminaux cachés dans les détails. Plus difficile à déchiffrer qu’un QR code. Ce qui est vraiment surprenant est le travail monstrueux des deux frères. Des centaines de plantes et d’insectes ont été répertoriés dans l’œuvre. Et je n’ose pas évoquer la restauration de la tête de l’agneau qui révéla le regard du christ. On voyage dans le mystique, j’en raffole et cherchent des messages codés dans les œuvres dissimulés sur des murs secrets.

   

Les Flandres sont très (un peu trop même) catholiques et l’écrivent dans les appellations des rues baptisées d’un nom saint. On y trouve peu de personnages politiques, parfois des indications géographique, rarement des batailles militaires gagnées. La Belgique aurait-elle perdu toutes ces guerres ou alors moins revancharde elle préfère honorer d’autres sujets que la guerre. Paris a un quai de Valmy et de Jemmapes, deux batailles dont l’une en Belgique. Gand a ses quais aux grains et au herbes, simplement car ici se pratiquait le commerce des céréales. A cet endroit les bateaux déchargeait et payaient les taxes, l’impôt sur l’importation datent de bien avant l’Europe. On ne peut pas tout mettre à charge sur Bruxelles. A cette époque la Belgique n’existait pas, il aura fallu la révolution de 1830 en France et les traités durent dessiner la Belgique sur les cartes. Ce ne fut pas simple et c’est encore compliqué.

  

Eglise ou bistrot ?  

 Accoudé au pont St Michel j’imagine tous ces solides bonhommes s’affairer sur les quais. Décharger, peser et stocker les cargaisons sous une pluie fine et par un froid de canard. Nous ne sommes pas à Venise, c’est la mer du nord. Si aujourd’hui d’un point vue climatique les Flandres ne sont pas en tête des revues de voyages, au moyen âge le tourisme ayant très très peu d’influence sur l’économie les Flandres se positionnaient bien dans l’import export. Gand a connu une belle époque industriel dans le textile. Cela commence avec les moutons anglais vers le XII siècle. Puis ça continua avec le coton congolais qui remplaça la laine anglaise. Pendant la révolution Française et l’empire Gand était chef lieu du département de l’Escaut sur les cartes de France. Là intervient un drôle de type, de ceux que l’on pense qu’ils ne peuvent exister que dans les films. Lievin Bauwens, né en 1769 à Gand était un jeune homme pendant «l’occupation» française. Avec l’entreprise de son père il fournit l’armée occupante en accessoires militaires.

   

C’est un bonapartiste convaincu. En tant qu’industriel il fait plusieurs voyage à Londres et devient espion. Autant par conviction que par convoitises, installé en négociant dans l’Angleterre ennemie il réussit un tour de force. Les anglais en avance technologiquement possédait une machine à tisser performante, la mule-jenny. Avec l’énergie hydraulique et une astucieuse mécanique la productivité est multiplié par 30 voir plus !

Vous imaginez ? Lievin Bauwens se procure une machine et l’envoie en pièces détachées à son frère négociant à Hambourg. Malgré quelques rebondissement qui feraient un très bon scénario la machine est remontée puis recopiée. C’est le départ de la grosse production. Napoléon lui-même le remercia en 1810 quand il passa par Gand. Sa fin fût plus difficile, notre espion décédera sans fortune à Paris en 1822. A ma prochaine visite au père Lachaise j’irai le voir.

  

Gand ne dissimule pas son passé industriel, il y a même un musée de l’industrie. Au détour d’une rue ou d’une place les anciennes fabriques sont dénoncées par la cheminée. C’est indéniable après le déclin du textile Gand n’est plus dans le peloton de tête du textile. Contrairement à Bruges et Venise la ville se prépare un autre futur que celui de musée. Il lui reste des atouts dont l’automobile. Volvo vient d’augmenter sa production de voiture électrique. La ville n’est pas dans de sales draps elle est même considérée comme la plus innovante en Belgique.

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Comments

[Alex]

Un grand merci pour cette explication, je verrais Gand sous un autre angle. J'attends ton analyse Wallonie VS Flandres, sérieux débat😆