Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Blog d'images54620
18 mars 2016

St Laurent du Maroni : au revoir

 

Guyane Française, St Laurent du Maroni. - Album photos - Le blog d'images54620

Guyane Française, St Laurent du Maroni. : Toutes les photos Guyane Française, St Laurent du Maroni. - Le blog d'images54620

http://jenesuispasdici.canalblog.com

 

cortostlaurent

Il faut 3 heures de voitures pour rejoindre St Laurent du Maroni depuis Cayenne, par la nationale 1. Il a fallu en casser des cailloux pour la construire, et des vies aussi, des vies qui valaient pas chères celles des forçats. J’ai choisi un covoiturage sur ce trajet. Ce trait de bitume entre l’océan et la jungle relie le Suriname au Brésil en traversant un département français. A mi-parcours nous nous arrêtons à Iracoubo visiter la fameuse église. Plusieurs personnes me l’avaient recommandée. Décorée par le matricule 23.492 (Pierre Huguet) elle est classée au titre des monuments historiques depuis 1978. Cela vaut le coup d’œil, mais je ne suis fan de l’art religieux. Le forçat a-t-il réalisé sa chapelle Sixtine par dévotion ou pour échapper aux pénibles travaux de voieries. C’est plus l’anecdote qui me plait : le travail d’un bagnard à l’inventaire des monuments historiques, rigolo.

 

iracoubo01      iracoubo02 

 Iracoubo a son poilu chaudement habillé devant la mairie, il faisait froid en février 1916 dans les tranchées de Verdun. Nous arrivons à St Laurent du Maroni, le chauffeur me dépose dans un carbet. J’y  accroche un hamac, Gilbert le patron m’explique comment y dormir,  j’ai mal dormi, tant pis. Gilbert vît à St Laurent depuis des décennies, il tient un petit commerce avec sa femme, et un perroquet fier comme un paon. Le soir, posée sur un escalier j’aperçois une brique estampillée AD, administration pénitentiaire une relique du bagne très convoitée. Gilbert aime son département, son pays, et l’histoire. La soirée est belle, propice à une bonne discussion : la France a-t-elle tenté d’effacer le bagne de son histoire ?

 

perroquetgilbert01    stlaurent07

  Oui, peut-être, non. Les avis divergent. Les bâtiments ont été laissés à l’abandon, le temps a fait le reste. Des friches historiques ils en existent dans tous nos départements. Aujourd’hui le camp de la transportation est transformé en musée, une réhabilitation réussie. Aux yeux d’un français de notre époque, le bagne est un petit épisode à peine connu. Qui se préoccupe encore de ce que fût la vie des forçats, par exemple à Epinal en 2016 ?  90 000 bagnards, un taux de mortalité élevé, une administration douteuse, il ne faut pas le nier. Je ne le nie pas. Oui, mais nous parlons d’assassins irrécupérables ! On ne va tout de même pas en faire des héros ! Pas tous, il y avait les relégués, petite délinquance récidiviste, envoyés ici pour en crever ils  ne risquaient plus de faire peur aux bourgeois d’Epinal, pour l’exemple. Un candidat à la présidence de la république préconise la réouverture des travaux forcés ! Quel con. L’histoire est un test : la dureté des peines a peu d’effet sur le crime. Cette leçon nous ne l’avons pas encore bien apprise, c’est un boulet.

.

bagne02    bagne11

En visitant le camp de la transportation j’ai ressuscité un fantôme de l’histoire. Comment ?  Esprit es tu là ? Vous ne croyez pas à ces sornettes ! J’ai manipulé le verrou d’une cellule, d’abord le frottement métal sur métal de la rotation du mécanisme suivi de la percution du levier sur la planche, voilà mon fantôme. J’étais du bon coté de la porte, émotion quand même. Ensuite je me suis installé à la terrasse joliment aménagée dans la cour du bagne pour me remettre ces émotions. Quelques visiteurs tournent dans la cour, dans un flash je les vois revêtus de l’habit blanc rayé de rouge. Un groupe de touriste forme un cercle autour du guide, c’est l’appel du matin de mes bagnards. Je suis trop dans le truc.

 bagne08

Je me suis rendu aussi aux îles du salut  et le camp des annamites également. Peut-être le pire. Les condamnés d’Indochine avaient droit à un régime de faveur : des cachots plus minuscules et des conditions pires qu’ailleurs.  Les trois îles du salut sont jolies, et mériteraient l’adjectif paradisiaque trop souvent galvaudés dans les dépliants d’agence de voyage. Vous ne trouvez pas ça drôle ? Le bagne au paradis ! Sur la royale, la plus grande de ces trois îles, l’auberge propose des nuits dans les anciens logements de surveillants, l’uniforme n’est pas fourni, plus besoin de maton car plus de forçats. Toutefois méfiez d’autres voleurs : les singes. Ils  vous épient  de leurs rochers.

ilesalut04   ilesalut01

L’île du diable est encore plus photogénique.  Dreyfus, innocent, séjourna sur ce caillou 1517 jours ! Ullmo lui était  coupable de trahison y resta 15 ans, pour éviter la folie il faisait la conversation aux requins. La troisième St Joseph, la crainte des durs, les bagnards l’avaient surnommée la mangeuse d’hommes.  

Aujourd’hui tout ceci c’est terminé. A St Laurent j’ai discuté avec des gens qui ne savent plus ce que c’était. Ils s’en foutent eux les descendants des marrons affranchis, leurs histoires n’est pas celles des gaulois. St Laurent du Maroni est une ville de 40 000 habitants, plus grande que la préfecture des Vosges, Epinal.  Un hôpital, plusieurs lycée, une sous-préfecture, tout ce qui fait une petite ville de province tranquille, mais en Amazonie. Les trottoirs ne sont pas encombrés, il n’y a pas foule dans les commerces de la rue Charles De Gaulle. L’ancien quartier de l’administration pénitentiaire possède encore de beaux bâtiments. Le reste de la ville, ne semble pas bien riches, volontairement je ne vous montrerais pas de baraques en tôles pourries. La vraie vie est au bord du fleuve. On est du fleuve avant d’être Français ou du Suriname, l’autre rive. Le fleuve ne sépare pas, c’est une artère vitale. Ce sont des traités qui en ont fait une frontière. Notre pays administre de la même façon les Vosges le l’Amazonie, heureusement les hommes du terrain ont l’intelligence de s’adapter à cette absurdité. Déjà trois jours que je vis avec mes fantômes du bagne, je dois évader mon l’esprit vers d’autres pensées. Au bord du fleuve je discute avec les piroguiers. Comment trouvent-ils la France d’ici ? «Je suis du Suriname, moi, ici c’est bien, mais de l’autre coté aussi »  une réponse de normand.   

 Il est temps de rêver à autre chose, de prendre le large, j’ai lu dans un livre que  Corto navigue de Paramaribo à Belem, (voir l’album Corto Maltése suite caribéenne) je vais l’attendre, il ne pourra pas refuser d’aider un évadé.      

 

TOUT SAVOIR SUR LE BAGNE DE GUYANNE :

Le bagne de Guyane

A gauche, une case permet de souscrire à la lettre du site qui vous avisera des nouvelles parutions et mises à jour. Une fonction recherche (sur le site) vous est également proposée. La consultation de cette (lien) vous informera en temps presque réel des nouvelles parutions. Dernière mise à jour: mercredi 22 août.

http://www.bagnedeguyane.fr

 Et aussi :

 

Reportage sur le bagne

Images du bagne des îles du Salut, en Guyane, commentées par un ancien forcat en compagnie de Roger LOUIS. Émission Cinq colonnes à la une Production producteur ou co-producteur Office national de radiodiffusion télévision française Générique journaliste

http://www.ina.fr

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
P
Nous y voilà dans l Histoire..raconté par toi ça a de l allure mieux que prof au lycée..<br /> <br /> Bises à bientôt
Répondre
Archives
Publicité
Publicité